Antonin Rouzier : objectif Jeux Olympiques – Coach Magazine France

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Le pointu de l’équipe de France de Volley-ball nous a confié ses secrets forme avant le tournoi de qualification pour les Jeux Olympiques de Rio.

Malgré votre titre de champions d’Europe, vous n’êtes pas qualifiés pour les JO. Pourquoi est-ce différent des autres sports ?

Je pense que notre fédération a moins d’expérience et manque d’organisation par rapport à celle des autres sports. Dans toutes les autres disciplines, les champions d’Europe vont aux Jeux Olympiques. Au volley-ball, non. On sent que la fédération internationale ne suit pas. Il y a eu récemment un vote qui a décrété que le prochain championnat d’Europe serait qualificatif pour les Jeux Olympiques. Ils ont donc vu que c’était une erreur de leur part. Mais comme nous avons été champions d’Europe avant le vote, on se sent lésés.

©FFVB

Il y a un risque que la France ne soit pas représentée aux Jeux Olympiques ?

Exactement. Ça va être un peu plus compliqué qu’aux championnats d’Europe où on a joué de petites équipes. Là, ça va être les huit meilleures équipes européennes qu’on va devoir battre. On n’a pas le droit à l’erreur. Un match perdu et c’est presque fini.

« On ne va pas cacher qu’on est les favoris de la compétition »

Rassure-nous, vous avez quand même une chance d’y aller ?

Oui ! On a beaucoup de chance parce qu’on a des joueurs exceptionnels dans notre équipe comme Earvin Ngapeth qui est l’un des meilleurs joueurs du monde actuellement. La team Yavbou est une génération talentueuse et c’est ce qui fait la différence. De plus, les joueurs ont tous entre 24 et 26 ans et ont donc une expérience internationale. Je suis un peu plus vieux et j’ai connu d’autres générations. C’est clair qu’on a une chance. Honnêtement on ne va pas cacher qu’on est favori de la compétition.

Qu’est-ce qui fait la force des Bleus  pour remporter les compétitions ?

On ne se prend pas la tête ! Si vous voyiez nos préparations d’avant matchs, vous rigoleriez ! Quand on arrive sur le terrain, on a les crocs mais avant, la préparation se fait dans la décontraction, le collectif. On est toujours en train de se charrier, de faire des vannes. Ensuite, on arrive à se concentrer en dix secondes. C’est vraiment ce qui fait la différence. On s’entend tous bien, comme des amis. Ça fait quatre ans qu’on est ensemble et on est devenu une bande de potes. C’est une génération en or : il n’y en a pas un qui a la grosse tête, on est tous au même niveau et c’est ce qui fait notre force.

Regrettes-tu que le volley soit moins médiatisé que d’autres sports comme le foot ou le basketball ?

Oui, je le regrette. Tous ces sports sont connus parce qu’ils ont gagné des trophées, qu’il y a beaucoup d’argent. Il y a beaucoup de sponsors et de marques qui suivent les joueurs. Nous ça n’existe pas encore. Je pense que ça va arriver mais il faut savoir que notre fédération est l’une des plus pauvres des fédérations françaises. Comme on ne va pas aux Jeux Olympiques, le gouvernement ne donne pas beaucoup de subventions. Les sponsors ne suivent pas. On a quand même la FDJ et Générali mais ils ne donnent pas assez d’argent pour nous permettre de vraiment faire connaître ce sport au niveau national.

Tu as confié que tu es plus connu en Pologne ou Turquie qu’en France. Ça ne te fait pas mal au cœur de ne pas être reconnu dans ton pays ?

Ça fait bizarre. Dans n’importe quel autre pays comme l’Italie, en Turquie, au Brésil, en Pologne, on est tous reconnus. On est comme le foot en France. Mais on arrive dans notre pays, on est incognito. Même si on en rigole, c’est un peu triste pour notre sport.

Le volley-ball reste un beau sport, et au niveau des actions ça reste spectaculaire. On a pu voir sur la finale sur France 4 qu’on a fait un pic à 1,2 millions de téléspectateurs, ce qui est bien pour une chaine de la TNT. Ça signifie que les gens ont envie de voir du volley mais qu’on ne s’en donne pas les moyens. On n’a pas les personnes compétentes dans notre fédération, ni le budget et ni les sponsors qui suivent. Ces trois choses peuvent faire la différence. On a vu qu’en gagnant les championnats d’Europe on a commencé à parler de nous (Le Grand Journal, Touche pas à mon poste) mais on est vite redescendu dans l’incognito.

Il faut qu’on fasse des résultats dans le long terme pour que notre sport intéresse le grand public. Nous on fait ce qu’il faut sur les réseaux sociaux, mais notre boulot de communication s’arrête là. Il y a des gens qui doivent prendre le relais mais qui ne le font pas.

©FFVB

Comment es-tu arrivé dans le volleyball ?

Je me suis inscrit au volley après avoir fait dix ans de natation. Mon père était volleyeur et j’étais curieux de connaître ce sport. Pour moi la natation est un sport difficile. Je me dis qu’il faut être fou ! C’est très perso, tu nages pendant des heures… Il faut faire beaucoup de sacrifices.

J’ai découvert le volley à 13 ans et c’est devenu une passion. Il s’est avéré que j’avais beaucoup de talent donc j’ai continué. Je voulais devenir un grand champion. Et dans mon palmarès il me manque les Jeux Olympiques. On va essayer de travailler pour ! Je suis content d’être arrivé à un très bon niveau cet été. Mais ce n’est pas fini.

Comment te prépares-tu avant chaque match ?

Tous les deux jours, on a un entrainement de musculation individualisé par poste et élaboré par notre préparateur physique de l’équipe de France. Pour mon poste de pointu, j’ai besoin de beaucoup d’explosivité parce que je saute souvent. Par exemple, je fais des répétitions de six sur du squat avec une charge assez lourde suivie de six sauts pour gagner en muscles rapides.

« Le sport de haut niveau c’est 70% dans la tête et 30% le physique. »

Tu as également déclaré qu’un match se gagne au mental. Comment arrives-tu à te motiver ?

Avant, je n’arrivais pas à le faire et j’étais un joueur irrégulier. Un préparateur mental est arrivé en équipe de France il y a trois ans et ça a été le déclic . Il m’a accompagné dans le cheminement pour arriver à ces performances. C’est là où j’ai compris que le sport de haut niveau c’est 70% dans la tête et 30% le physique. Avoir la niaque sur le terrain est une attitude difficile à avoir. Moi ce n’est pas dans ma nature, je suis quelqu’un de réservé et assez calme. J’ai besoin de forcer ma nature.

Comment arrives-tu à décompresser après un match ?

C’est compliqué. Des fois, comme pour la demi-finale des championnats d’Europe contre la Bulgarie, je n’ai pas dormi. Faire redescendre la pression après un match est compliqué. En général je me fais faire un massage et je joue aux cartes avec mes potes.

Sportif professionnel nécessite une bonne hygiène de vie, est-ce que tu suis un régime particulier avant un match ?

Je pense que le régime du sportif de haut niveau est un mythe. On a une bonne hygiène de vie, c’est certain. C’est un nutritionniste qui fait les repas quand on est à l’hôtel, on n’a pas le droit aux excès avant un match pour ne pas être en hypoglycémie. Mais on se permet tout de même certains écarts car on sait qu’on va vite le perdre. Ensuite, dans certains sports comme le judo, les sportifs doivent faire attention à leur poids pour la pesée mais nous, on fait attention mais pas trop.

Donc tu n’es pas contraint de te restreindre… Tu as un pêché mignon ?

J’en ai plein car j’adore la gastronomie ! J’aime aller dans des bons restaurants quand j’ai une semaine de repos, découvrir de nouvelles sensations. Ce qu’il me manque le plus quand je suis à l’étranger, c’est la gastronomie française. On a besoin de se faire plaisir en faisant quelques excès sans abuser car faire un régime spécial, pour ma part, je n’y crois pas trop.

Donc si tu vas à Rio, tu pourras consommer des caïpirinhas ?

Oui ! (Rires) La première chose qu’on a faite quand  on a été à Rio c’est boire une caïpirinha sur Copa Cabana.

As-tu un secret forme à partager avec nos lecteurs ?

Je bois énormément. Pour moi c’est important de s’hydrater surtout quand on est sportif car on transpire beaucoup.

Par Carole Bilien